4 questions au… Dr Jocelyne Borel-Kuhner,
médecin urgentiste, consultation de la douleur et yogathérapie à l’Hôpital NOVO (site de Pontoise).
Vous avez fondé un D.U. de yogathérapie qui accueille bientôt ses premiers étudiants. Est-ce une première en France ?
Oui, en effet, ce D.U. « Médecine Fonctionnelle et Yogathérapie » commence en novembre cette année. Adossé à la faculté de sciences de Cergy, ce cursus rapproche pour la première fois en France les études yogiques et scientifiques de façon rigoureuse. Il est accessible aux médecins, mais aussi aux professeurs de yoga et professionnels du soin tels que les kinésithérapeutes. 25 personnes ont postulé cette année, et il y a d’ores et déjà beaucoup de demandes pour l’année prochaine – cet intérêt montre que les demandes sociétales comme celles des médecins ont bien évolué. Cofondatrice avec les Pr D. Seyer et le Dr N. Rodenbucher, j’en assurerai la majorité des heures d’enseignement, aux côtés d’autres médecins et chercheurs renommés.
En quoi consiste la yogathérapie ?
Il s’agit de mouvements de yoga adaptés très doux, synchronisés au souffle. Ils permettent au patient de retrouver des sensations corporelles agréables de manière à remobiliser ses capacités propres, à se refaire confiance pour rompre le cercle vicieux de la douleur. C’est une des approches complémentaires des traitements classiques pour des pathologies qui résistent aux techniques traditionnelles : rhumatismes inflammatoires chroniques, fibromyalgies, post traumatismes avec douleurs résiduelles, AVC, et maladies inflammatoires en général.
Quelle est l’efficacité de cette approche ?
A l’hôpital de Pontoise, nous venons de terminer les résultats d’une étude rétrospective qui montre que la yogathérapie permet une diminution de la douleur de 3 points sur les échelles de douleur, et une grande efficacité sur les douleurs neuropathiques, périnéales et les sciatiques chroniques. Les mécanismes d’action sont de mieux en mieux connus : pratiquée de façon régulière, la yogathérapie agit sur le système nerveux autonome et modifie les mécanismes épigénétiques, c’est-à-dire l’activité de certains gènes, permettant de diminuer l’expression de la maladie. J’ai découvert presque par hasard cette technique il y a une douzaine d’années, quand je pilotais le service des Urgences de l’hôpital Simone Veil et que s’ouvrait une consultation de yogathérapie, dont le succès m’a conduite à approfondir le sujet à l’hôpital d’Eaubonne en faisant une formation de professeur de yoga et un DU de « médecine, méditation et neuro sciences » à Strasbourg.
Comment fonctionne la consultation à l’hôpital NOVO de Pontoise ?
En fonction de chaque patient, on décide quelle thérapie est la plus indiquée parmi l’acupuncture, l’hypnose, la micronutrition, la yogathérapie, la musicothérapie. Le patient apprend les gestes en consultation, puis les répète chez lui deux fois par jour, avec un suivi hospitalier tous les 6 mois. Avec plus de deux mille patients traités, et quatre cents en file active, cette consultation est l’une des deux seules tenues par un médecin en France. J’espère que le D.U qui commence à Cergy suscitera d’autres vocations…
Propos recueillis par Nathalie Chahine