3 questions au… Catherine Campinos,

cheffe du service d’endocrinologie à l’hôpital de Pontoise

Quelle place pour le patient expert en ETP (Education Thérapeutique) ?

Des patients experts interviennent-ils dans le cadre de l’éducation thérapeutique (ETP) dans votre service ?

Il nous est arrivé de faire appel à des personnes qui l’avaient proposé, surtout dans un partage d’expérience lors du développement des pancréas artificiels chez les diabétiques de type 1. Mais leur apport pourrait être développé davantage, notamment pour co-construire ou réévaluer les programmes d’ETP dans le suivi du diabète dont la gestion au quotidien est complexe – je pense aux femmes diabétiques, mais aussi aux conseils pratiques aux jeunes mamans – pour gérer les hypoglycémies pendant l’allaitement par exemple, et pour d’autres pathologies comme l’obésité.

L’intervention d’un pair est positive en permettant une réassurance du patient, car elle est validée par des professionnels de santé. Leur rôle d’intermédiaire entre l’équipe soignante et le patient constitue un levier pour accepter la maladie, faciliter le quotidien des malades et l’observance des traitements.

Comment sont-ils formés ?

Ce rôle délicat ne peut en effet s’improviser. Ils reçoivent en théorie une formation spécialisée de 40H délivrée par une association, ou passent un DU « Patient formateur au parcours en soins chroniques » dans une Université des Patients.

Mais ce cadre me paraît encore flou, tout comme leur dénomination – « patient expert », « patient-partenaire », « patient aidant », « patient-formateur », etc. Dans tous les cas, ces personnes doivent être atteintes de la maladie chronique pour laquelle on leur demande d’intervenir, participer sans trop dériver sur leur expérience personnelle ni ériger leur vécu en vérité absolue, avoir une attitude respectueuse et empathique, et être en bons termes avec le corps médical !

Ces patients experts deviennent-ils de nouveaux professionnels de santé ?

En effet, la question se pose, d’autant que le recours à ces aidants se développe. Actuellement, ils sont pour la plupart bénévoles. Mais comme ils se professionnalisent, en passant un DU validé par un stage encadré par un Infirmier en Pratique Avancé, ils devraient être rémunérés (ce serait déjà le cas d’environ 40% d’entre eux). Plus largement, comment leur présence sera-t-elle formalisée au sein d’équipes comprenant déjà médecin, infirmier.e.s, psychologue, assistante sociale, podologue, éducateur en activités physiques adaptées, etc ? Faut-il considérer ce rôle comme une nouvelle profession, avec les conséquences statutaires et juridiques qui s’imposent ? On le voit, la question est loin d’être simple…

Propos recueillis par Nathalie Chahine