Chères Consœurs, Chers Confrères,

Pour manifester son soutien au mouvement de grève des médecins le 14 février 2023, le CDOM 95 apposera une banderole en façade de ses locaux, et sera présent à la manifestation ce même jour à Paris.

Le 14 février 2023 marque le premier jour d’examen au Sénat de la loi « RIST ». Adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale, sans opposition parlementaire, cette loi vise principalement à proposer des solutions à la pénurie de médecins traitants. En effet, six millions de personnes, dont 650 000 en ALD, n’ont aujourd’hui pas de médecin traitant en France.

La loi « RIST » est critiquée par l’ensemble des médecins libéraux, à juste titre, principalement parce qu’elle ouvre la voie à l’accès direct et non réellement coordonné ni protocolisé en particulier aux IPA (Infirmiers en Pratique Avancée), qui seraient notamment autorisés à la primo-prescription, ainsi qu’à d’autres professions de santé (kinésithérapeutes et orthophonistes).

Pour la première fois de son histoire, le CNOM, prendra part à la mobilisation en se rendant dans les rues de la capitale le 14 février. L’instance ordinale proteste ainsi contre la désorganisation des soins qu’entraînerait la loi, si elle entrait en vigueur en l’état, ainsi que la promesse d’une médecine à deux vitesses et de la perte de chance qu’elle implique pour les patients.

Plusieurs propositions d’amendements ont été soumises par le CNOM au Sénat, dont la pierre angulaire est que le diagnostic médical et la stratégie thérapeutique restent du seul ressort des médecins, formés au moins dix années dans cet objectif. La rédaction d’un protocole organisationnel au sein des structures doit être imposée dans les textes, afin d’encadrer la notion de l’exercice coordonné par le médecin. Rappelons qu’aujourd’hui, la simple adhésion à une CPTS qualifie l’exercice par défaut de « coordonné », l’IPA, le kinésithérapeute ou l’orthophoniste adressant leur compte-rendu au médecin par simple mail sécurisé, sans autre forme de supervision, ou de délégation. Le dossier médical risque de ne devenir qu’un empilement de comptes-rendus.

Or ce n’est qu’à cette condition d’encadrement contractualisé du projet thérapeutique par le médecin que pourront être respectées les exigences de qualité, de traçabilité et de sécurité des soins par des équipes pluridisciplinaires, exigences que nous devons à nos patients.

Reste encore le point abordé dans la proposition de loi pour le moins flou de « responsabilité collective » de la PDSA (Permanence des Soins Ambulatoires), qu’il convient de définir clairement et d’encadrer.

Et concernant la rémunération valorisée des soins de proximité et des soins non programmés, quid des consultations complexes qui prennent du temps au médecin traitant ?? En marge de la loi RIST, la revalorisation globale du tarif des consultations est une attente forte de la profession, qui doit être entendue au-delà des soins non programmés.

Concrètement, la loi RIST, supposée répondre à l’attente des patients, est un leurre au progrès dans l’accès aux soins dans le secteur libéral, car elle conduit inéluctablement à un nivellement par le bas de leur qualité et dévalorise la fonction du médecin traitant. Certains pensent déjà au déconventionnement, et d’autres à la reconversion.  On ne peut écarter que les jeunes diplômés délaissent la médecine générale pour d’autres spécialités, d’autant que les contraintes géographiques à l’installation feront sans doute bientôt l’actualité dans des textes en préparation. Pour l’hôpital, même s’il est hors du champ de la loi RIST, le constat reste évidemment tout aussi préoccupant, en particulier sur le plan des ressources humaines. Les urgences sont à bout de souffle, les personnels s’épuisent, les moyens ne couvrent pas les besoins.

Pour conclure, si le Conseil National de l’Ordre des médecins défend avec vigueur le fait que le médecin doive rester la seule porte d’entrée pour établir le projet diagnostique et thérapeutique global du patient, le conseil départemental du Val d’Oise de l’Ordre des Médecins entend pour sa part soutenir sur le terrain et au quotidien l’ensemble des confrères décidés à faire valoir les critères de qualité des soins et de leur organisation, tous statuts confondus : libéraux, hospitaliers et salariés, et sera présent à la manifestation du 14 février prochain.

Sandrine Duranton,
présidente du CDOM95